Suivis de populations
Suivre les tendances démographiques des populations pour ajuster les actions de gestion
Connaître les paramètres démographiques des populations de geckos (effectifs, sexe-ratio, classes d’âge, taux de survie…) est essentiel pour comprendre les mécanismes qui entraînent leur déclin, et mener des actions de conservation en conséquence.
Depuis 2015, NOI suit la démographie de deux populations de Gecko vert de Manapany dans les falaises de Petite-Ile, considérées comme faisant partie des dernières populations « sauvages ». Ce suivi à long terme a permis de mettre en évidence un déclin rapide, avec une chute de plus de 60% des effectifs en 6 ans, et d’identifier le mécanisme principal de ce déclin, à savoir une forte mortalité des individus juvéniles. C’est face à ce constat que s’est mis en place un projet d’élevage transitoire, déployé entre 2020 et 2022, pour permettre aux jeunes de passer cette phase de vulnérabilité et ainsi créer du recrutement dans ces populations. Le but de ce projet est non seulement d’éviter que ces populations ne disparaissent à court terme, mais aussi de gagner du temps pour continuer à les étudier et identifier les causes exactes de la forte mortalité des juvéniles.
Quelle méthode pour les suivis ?
Pour suivre la démographie des populations de geckos, NOI utilise la méthode de capture-marquage-recapture (CMR). Cela consiste à réaliser des sessions de captures d’individus répétées dans le temps, avec marquage puis relâcher des individus. La proportion d’individus recapturés entre les différentes sessions permet d’estimer les effectifs, le recrutement et les taux de survie.
Pour le Gecko vert de Manapany, les individus ne sont pas capturés à proprement parler, mais ils sont pris en photo puis identifiés grâce à leur patron de coloration, qui est unique en fonction des individus : on parle de photo-identification.
Voici un exemple de photos permettant de différencier des individus
Suivi de la reproduction
Lors de la saison principale de reproduction (septembre – mars), NOI réalise également un suivi des sites de pontes connus afin d’estimer le nombre d’œufs produits et les taux d’éclosion. Cela permet de savoir comment évolue la capacité de reproduction des populations au fil des années.
Les œufs sont généralement situés dans des cavités rocheuses ou dans les anfractuosités des troncs de vacoas, ou encore dans les interstices de feuilles. Une femelle pond un ou deux œufs, qu’elle colle entre eux et au support. Les femelles sont fidèles à leur site de ponte et ont tendance à rassembler leur œufs au sein de « pontes communautaires ».
Prochaine étape : étendre et pérenniser le suivi des reptiles à enjeux sur l’ensemble du territoire.
A partir de 2025, un projet de surveillance de l’herpétofaune de l’Océan Indien est lancé, en partenariat avec la Société Herpétologique de France (SHF) et le Groupe d’Etude et de Protection des Oiseaux de Mayotte (GEPOMAY). Ce projet part du constat que les tendances de populations de la plupart de espèces de reptiles indigènes demeurent inconnues, et ne peuvent être évaluées du fait d’un manque de données à leur sujet sur ces territoires d’outre-mer. Il devient donc urgent de mettre en place une surveillance de ces espèces, afin de pouvoir mesurer d’éventuelles diminutions de leurs populations, et pouvoir agir rapidement pour garantir leur préservation.
Malgré la disponibilité de rares protocoles déployés chez quelques espèces (PNA), peu d’entre eux ont bénéficié d’une évaluation statistique, et aucun n’est déployé à l’échelle des territoires concernés. De plus, dans ce contexte tropical hébergeant des espèces difficilement détectables, il convient de tester des méthodes innovantes pour améliorer la détection de ces espèces.
Ce projet prévoit donc la validation statistique et le déploiement de protocoles pour le suivi des tendances des reptiles terrestres indigènes de La Réunion sur le long terme. Ces protocoles bénéficieront d’une animation et d’une coordination nationale, appuyée par des structures locales implantées sur les territoires concernés.